Depuis janvier 2018, près de 50 personnes occupent illégalement une maison de deux étages située dans un terrain appartenant à la commune de Soisy-sous-Montmorency. Ce terrain, ou se situent les anciennes Fonderies Bernard, est destiné à accueillir un jour le futur Espace Culturel de Soisy. Les occupants ayant dépassés le délai de 48 heures de présence sur les lieux, la ville a dû engager une procédure judiciaire dans l’espoir d’expulser les occupants. La question de l’absence d’une réelle surveillance de ces terrains, pourtant achetés à prix fort avec l’argent des contribuables, est fortement pointée du doigt par l’opposition municipale.
La loi précise que si une personne occupe illégalement un logement, il existe un délai au delà duquel elle ne peut plus se faire expulser par la police sans passer d’abord par une décision de justice. Ce délai est de 48 heures. Ainsi, la ville de Soisy avait 48 heures maximum pour constater la présence illégale de personnes dans l’un de ces biens, et demander leur expulsion. Ce délai n’a pas pas été respecté. Lorsque que les policiers nationaux se sont présentés devant la maison, un justificatif daté de plus de 48 heures leur a été présenté par les occupants, de sorte qu’aucune expulsion n’était plus possible sans saisine de la justice. La ville a alors dû déposer une requête en référé auprès du Tribunal de Grande Instance de Pontoise, le 14 février. Après plusieurs reports, l’audience s’est finalement déroulée le 2 mai. Le jugement est attendu dans les prochains jours.
Des terrains achetés 1 500 000€ en 2013… pour une surveillance qui faisait cruellement défaut
Le 7 février 2013, la ville de Soisy a acheté plusieurs parcelles de terrains (9 883m²) dont l’ancienne fonderie Bernard et une maison donnant sur l’avenue d’Alembert, tout cela pour la modique somme de 1,5 million d’euros. Cette acquisition venait en complément de précédents achats de terrains en vue de construire le futur Espace Culturel sur une surface totale de 18 000m², équipement promis depuis 1995 par le maire de la ville, Luc Strehaiano. On aurait donc pu penser que la commune allait prendre grand soin de tels terrains au regard du prix d’achat mais aussi des projets d’avenir pour Soisy.
Au printemps 2018, l’opposition municipale a demandé au maire pourquoi il y avait eu une défaillance dans la surveillance de la maison ? Il a alors répondu qu’un gardien y habitait et qu’il était parti quelques temps en vacances, ce qui expliquerait l’occupation soudaine. Les choses ne sont pas si simples.
Si un gardien municipal habitait bien la maison depuis l’acquisition du bien, la ville a décidé, à l’été 2017, de faire démolir cette maison ainsi que les anciennes fonderies Bernard. Cela dans le but de construire par dessus le tant attendu Espace Culturel. C’est ainsi qu’un marché public de démolition a été signé le 14 août 2017 avec la société Melchiorre pour une valeur de 106.400€ HT.
En vue de la démolition de la maison, il a donc été demandé au gardien de quitter les lieux. Il a dû déménager au début de l’automne 2017 pour être déplacé par la ville à la rue de Montmorency. Le maire a indiqué aux élus de l’opposition que le gardien continuait cependant d’effectuer quelques visites dans la maison en attendant la démolition. La réalité est un petit peu différente. L’ancien gardien de la maison, que LeSoiseen.info a pu rencontrer, est parti en vacances prolongées à l’étranger d’octobre 2017 à avril 2018, il pouvait donc difficilement effectuer une quelconque visite de cette maison jusqu’à quelques jours avant la venue des roms. Cette longue absence de gardiennage de la maison, intervient alors qu’elle se situe à seulement 200 mètres du poste de police municipale. Une telle négligence de la part de l’équipe municipale pose la question des moyens accordés à la police municipale à Soisy, de la fréquence, des horaires et du parcours des rondes de police, mais aussi des effectifs de policiers municipaux qui sont aujourd’hui bien insuffisants au regard des besoins.
Comment donc un maire, qui s’autoproclame champion de la sécurité dans sa ville, a t-il pu laisser passer une telle occupation sur des terrains achetés à prix d’or avec l’argent public ? Face à ce défaut de sécurité dans la ville, le maire a indiqué, en conseil municipal du 18 mai 2018, qu’une réflexion pourrait être menée concernant la surveillance de tous les autres terrains municipaux. Une réflexion qui intervient 23 ans après son installation au poste de maire de Soisy.
Des tensions entre les roms et les riverains, des véhicules incendiés, et une pétition remise au maire
Depuis l’arrivée des familles de roms, un certain nombre de riverains (notamment des avenues d’Alembert, Montesquieu et Diderot) se plaignent de problèmes de sécurité qui se seraient fortement accentués. D’autres nous ont indiqué, à l’inverse, ne pas avoir rencontré de problèmes particuliers suite à l’installation de roms à proximité de chez eux.
Une pétition a été initiée par les riverains et a récolté beaucoup de signatures, avant d’être remise le 18 avril 2018 au maire, Luc Strehaiano. Ce dernier leur a répondu le 7 mai dernier. Dans leur pétition, les habitants indiquent avoir constaté une hausse des cambriolages dans les résidences alentours, ainsi que des dégradations de véhicules, vols d’essence ou encore violences envers des animaux domestiques. Une habitante nous a affirmé avoir vu, en revenant de son sport en soirée, des individus tenter d’attraper le chien d’un de ses voisins à travers la clôture du jardin. Les riverains dénoncent également des problèmes avec les bouches à incendie que les familles de roms ouvriraient afin de se servir en eau, et cela car la ville a fait couper l’eau dans la maison occupée. En réaction, la municipalité a fermé les bouches à incendie située à proximité de la maison occupée. Ce qui n’est pas sans risques en cas d’incendie.
Un autre problème constaté est celui de l’engorgement des places de parking situés aux alentours. Ainsi, les places avenue d’Alembert et celles du parking de Loisirs et Culture sont régulièrement occupés par des véhicules et camions de ces familles de roms. Cela est notamment la conséquence du dépôt par la ville, en février 2018, d’un tas de terre devant la maison occupée (voir la photographie d’illustration de notre article), et cela malgré les contre-indications des pompiers et secours qui ont alerté le maire sur les problèmes d’accessibilité en cas d’incendie dans la maison. La raison invoquée par le maire est que ce tas de terre empêcherait l’accès des véhicules et compliquerait la vie des familles de roms dans le transport de métaux et autres bouts de ferraille qu’ils feraient parvenir via ces camions, avant de les exploiter sur le terrain. Le seul résultat de cette mesure est l’engorgement des places de parking aux alentours. Les Soiséens apprécieront.
Les tensions entre les riverains et les roms sont montées d’un cran il y a quelques jours. Début mai, alors qu’il était 2 heures du matin, les habitants de l’avenue d’Alembert sont brutalement réveillés par des véhicules de pompiers et de secours. Un incendie volontaire de deux véhicules appartenant à des familles de roms venait d’avoir lieu. Les vitres des véhicules ont été brisés à l’aide de marteaux. La miroiterie située juste derrière a même été touchée par les flammes. Les habitants avec qui nous avons pu discuter nous ont indiqué que cela serait le fruit de riverains qui auraient agi par vengeance. Les véhicules brûlés n’ont été enlevés que plusieurs jours après l’incendie, ce qui posait un grave problème de sécurité notamment pour les enfants passant à proximité.
L’association Ligue des droits de l’homme (LDH) est en train de suivre le dossier de ces familles de roms de près. Elle a pour but d’aider les familles dans leur condition de vie quotidienne mais aussi pour trouver de futures places d’hébergement en cas d’expulsion. On dénombre plusieurs enfants, des bébés à l’adolescence, qui ne bénéficient d’aucune scolarisation. L’association LDH nous apprend que ces familles de roms avaient d’abord été expulsés d’Argenteuil en 2017 avant de quitter la France. Ils sont alors revenus en France début janvier 2018, plus précisément à Soisy dans le terrain actuellement occupé et cela à la suite d’un repérage des lieux en amont, lié à l’absence de surveillance de la part de la ville. Une membre de l’association LDH, que nous avons rencontré, dénonce par ailleurs le fait que la ville a fait couper l’eau dans la maison ou encore les destructions par deux fois de cabanes construites en 48 heures par les roms sur le terrain occupé. Pour cette militante, ces familles ne souhaitent pas s’y installer éternellement mais espèrent trouver un toit, tels d’autres roms que l’association a aidé et qui se sont aujourd’hui intégrés.
Malgré les promesses du maire, l’Espace Culturel ne sera pas construit en 2020
A chaque élection municipale depuis 1995, nous n’y échappons pas. Le maire et son équipe promettent aux électeurs de réaliser un Espace Culturel pour combler la pauvreté de la politique culturelle de Soisy. En 2001, un grand panneau annonçant l’arrivée prochaine de l’équipement avait même été érigé sur le terrain quelques semaines avant l’élection municipale, et a été retiré aussitôt la réélection du maire acquise. 23 ans plus tard, les choses n’ont que très peu avancées et plusieurs obstacles indiquent que la dernière promesse du maire effectuée en 2014, annonçant l’inauguration de l’Espace Culturel avant 2020, sera comme les autres : non tenue.
En début d’année 2015, le Conseil municipal de Soisy a élu, parmi 104 candidatures, l’architecte qui devra concevoir l’équipement culturel. Il se trouve que l’architecte désigné n’est autre que celui qui embauche la fille du maire de la ville. Suite à l’attribution de ce marché public, l’association de défense des contribuables de Soisy a alors déposé deux plaintes en 2016, l’une au pénal pour soupçons de corruption et prise illégale d’intérêts, l’autre au niveau administratif afin d’annuler le contrat avec l’architecte. Il parait ainsi peu probable que des travaux soient engagés tant que ces procédures n’arrivent à leur terme. Car en cas d’annulation du contrat par la justice administrative, tout travaux qui aurait démarré devra être aussitôt stoppés. Un risque financier que ne semble pas vouloir prendre le maire de Soisy.
En parallèle de ces procédures judiciaires, ont été découvertes dans les anciennes Fonderies Bernard des chauves-souris. Ainsi, il est impossible de démolir les bâtiments en présence de ces espèces protégées. Une association de défense des chauve-souris a saisi les autorités en ce sens. De ce fait, la ville doit obtenir une dérogation de la part du ministère de l’environnement et de la préfecture du Val-d’Oise si elle espère pouvoir démolir l’ancienne fonderie Bernard. Le problème étant que l’obtention d’une telle dérogation est assez longue.
A ce jour, le projet définitif d’Espace Culturel n’a toujours pas été présenté devant le Conseil municipal, alors même que l’architecte a été désigné il y a plus de deux ans. Un retard qui s’explique largement par les problèmes juridiques rencontrés par la ville sur ce dossier.
Les travaux de construction d’un tel équipement devront s’étaler sur un délai minimal de deux années. Délai auquel il faut ajouter celui de la démolition des fonderies Bernard et de la maison actuellement occupée par des roms, ainsi qu’une éventuelle dépollution du terrain des anciennes fonderies. Ce qui nous amène à entre 3 et 4 années de chantier. Aujourd’hui, en mai 2018, ni la démolition, ni les travaux de construction n’ont démarré. A moins de 22 mois des prochaines élections municipales, il est donc certain qu’aucun Espace Culturel ne verra le jour à Soisy-sous-Montmorency en mars 2020, date de la prochaine élection municipale.
Comme dans de nombreuses autres villes de France, Soisy met en place toute l’année un dispositif appelé “opération tranquillité vacances” censé assurer que votre logement ne soit pas visité pendant votre séjour en vacances. Avec cette affaire d’occupation illégale, les Soiséens s’interrogent sur l’efficacité d’un tel dispositif. Il parait difficile d’accorder de la crédibilité à une opération de sécurisation de nos logements si la ville est elle-même incapable de faire surveiller ses propres biens et terrains municipaux et d’empêcher une occupation illégale…
Réactions
Omar Bekare
Les derniers articles par Omar Bekare (tout voir)
- Bygmalion : Luc Strehaiano reconnu coupable et condamné pour favoritisme dans l’attribution de marchés publics - 5 octobre 2020
- Foot : le soiséen Alan Virginius signe son premier contrat professionnel - 7 juillet 2020
- Municipales : des solutions face aux bouchons de l’avenue Kellermann ? - 13 mars 2020